vendredi 29 mai 2015

Ode au Tech en 1912

Le Tech en crue à Céret (2014)
On peut lire dans le n°1182 d'Amélie Journal du 11 janvier 1912, un poème de Marc Anfossi dédié au Tech, principal cours d'eau du Vallespir.

Le Tech

Tantôt c'est un serpent bleuâtre
Glissant sur les galets polis ;
Tantôt c'est un ruisseau folâtre
Dont on entend le gazouillis,

Par instants, il gronde, il moutonne,
Emportant arbres et maisons,
Pareil à l'ouragan qui tonne
Il dévaste les floraisons.

Puis, reprenant son cours tranquille
De bon Tech, placide cours d'eau,
Il laisse à découvert quelque île
Où revient becqueter l'oiseau.

Le Tech ressemble à l'âme humaine
Qui parfois, distillant la haine,
Engloutit l'Amour et l'Espoir,
Et qui, dans les larmes calmée,
Se trouve conquise et charmée
Par les douces chansons du soir.

Marc Anfossi
Amélie-les-Bains, janvier 1912.

Cet écrivain oublié aujourd'hui, et sans doute de passage en cure à Amélie-les-Bains, a beaucoup publié entre 1890 et 1910. On trouve de lui de nombreux poèmes en tous genres et des romans-feuilletons pour la presse nationale ainsi que pour la jeunesse. On peut voir ci-dessous une affiche publicitaire pour un de ses romans-feuilletons à paraître dans Le Matin en 1900, Les Chevaliers du pneu.

Affiche réalisée par Raymond Tournon


Source : Amélie Journal du 11 janvier 1912 (via Bib. numérique de Perpignan, domaine public)
Photo : Fabricio Cardenas (crue du 1er décembre 2014) (CC-BY-SA)
Illustration : Affiche de Raymond Tournon (1879-1919) (via Gallica, domaine public)



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samedi 23 mai 2015

Un terrifiant champion à la foire de Prades en 1880

Un arracheur de dents
On trouve dans Le Canigou : journal de Prades et des Pyrénées-Orientales du 21 février 1880 une description à première vue tout à fait banale de la foire de Prades ayant eu lieu en cette saison. Une brève anecdote vient cependant nous rappeler,  si besoin était, que malgré toute la nostalgie que l'on peut avoir pour la période dite de la Belle époque aucun de nos contemporains ne retournerait vivre en ce temps sans le confort médical auquel nous sommes tous habitués de nos jours.

La foire de mardi dernier a été favorisée par un beau temps : la matinée, particulièrement, a été irréprochable ; aussi vendeurs, acheteurs et promeneurs ont-ils été très nombreux, et les transactions aussi brillantes que productives. Quelques distractions égayaient la foule ; entr'autres un arracheur de dents provoquait de nombreux éclats de rire, non par la façon dont il opérait, mais par le boniment qu'il débitait avec un entrain et une prétention dignes de Mangin, de charlatanesque mémoire.
- Le Roussillon, répétait-il imperturbablement, est célèbre par la naissance de deux grands hommes : Parazols et Arago.
Inutile d'ajouter que c'était lui qu'il désignait ainsi en premier. Ce singulier et audacieux rapprochement, joint au nombre invraisemblable de dents qu'il disait avoir arrachées à Perpignan (475 dans une heure), retenait quelques instants les passants, sans leur donner toutefois l'envie d'augmenter le nombre des victimes et même des cures de l'intarissable Parazols.

Le score de 475 dents arrachées en une heure est sans doute exagéré, mais on peut faire confiance à ces apprentis-dentistes de l'époque pour avoir su être rapide et efficace, quoique certainement pas sans douleur auprès de leurs patients. Pour couvrir les cris, certains se faisaient même accompagner de quelques musiciens dont la mission était de jouer le plus fort possible pendant l'opération (tout en attirant les badauds par la même occasion). Personne ne regrette cette époque !

Source :
Le Canigou du 21 février 1880 (via le fonds numrisé de la BM de Perpignan) [domaine public]
Illustration : Tableau de 1651 par le peintre néerlandais Jan Steen (XVIIe s.) [domaine public]

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jeudi 14 mai 2015

Création de Corbère-les-Cabanes en 1856

Sur la carte de Cassini (XVIIIème s.), on peut voir Corbère et "Les Cabanes".
Le petit hameau des Cabanes naît au XVIème siècle au nord-est de Corbère, en Ribéral, et se développe au siècle suivant, jusqu'à prendre un peu d'importance et finir par demander son indépendance par rapport à sa commune d'origine au cours du XIXème siècle.

C'est chose faite le 14 mai 1856, date à laquelle est promulguée par Napoléon III la loi créant la commune de Corbère-les-Cabanes par détachement de la commune de Corbère. Voyons le détail du texte de loi.

N°3586 - Loi portant que la section des Cabanes est distraite de la commune de Corbère (Pyrénées-Orientales)  et érigée en commune distincte, sous le nom de Corbère-les-Cabanes.


Du 14 mai 1856

NAPOLÉON, par la grâce de Dieu et la volonté nationale, EMPEREUR DES FRANÇAIS, à tous présents et à venir, SALUT.

AVONS SANCTIONNÉ et SANCTIONNONS, PROMULGUÉ et PROMULGUONS ce qui suit :


LOI


Extrait du procès-verbal du Corps législatif

LE CORPS LÉGISLATIF A ADOPTÉ LE PROJET DE LOI dont la teneur suit :

ART. Ier. La section des Cabanes, dont le territoire est indiqué par une teinte brique sur le plan annexé à la présente loi, est distraite de la commune de Corbère, canton de Millas, arrondissement de Perpignan, département des Pyrénées-Orientales, et érigée en commune distinctte, sous le nom de Corbère-les-Cabanes.
Le chef-lieu de cette commune est fixé aux Cabanes.
En conséquence, la limite entre les communes de Corbère-les-Cabanes et Corbère est établie conformément au tracé de la ligne aurore dudit plan.
2. Les dispositions qui précèdent auront lieu sans préjudice des droits d'usage ou autres qui pourraient être respectivement acquis.
(...)
Fait au palais des Tuileries, le 14 mai 1856.

Signé NAPOLÉON
Par l'Empereur :
Le Ministre d' état,
Signé Achille Fould

Vu et scellé du grand sceau :
Le Garde des sceaux, Ministre secrétaire d'état
au département de la justice,
Signé Abbatucci.

Avant la séparation, la commune de Corbère avait une superficie de 1139 hectares. Avec la création de Corbère-les-Cabanes, elle en perd 414, tombant ainsi a une nouvelle superficie de 725 hectares.
Concernant la population, Corbère compte 1481 habitants en 1851. Le recensement suivant, en 1856, ne donne plus que 997 habitants pour Corbère, soit 484 de moins, alors que Corbère-les-Cabanes, dont c'est le premier recensement distinct, compte désormais 496 habitants. De nos jours la situation a bien changé, puisque l'on ne trouve plus en 2012 que 717 habitants à Corbère pour 1125 à Corbère-les-Cabanes.

Sources :
Texte de loi : Bulletin des lois de la République française de mai 1856 (via Gallica) (domaine public)
Autres infos :
Notices Cassini de Corbère et Corbère-les-Cabanes.
Jean-Pierre Pélissier, Paroisses et communes de France : dictionnaire d'histoire administrative et démographique, vol. 66 : Pyrénées-Orientales, Paris, CNRS,‎



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jeudi 7 mai 2015

Orties inoffensives à Collioure en 1874

Grande ortie
On peut lire dans La Science illustrée du 16 décembre 1902 une observation botanique effectuée par Charles Naudin à Collioure presque trente ans auparavant concernant l'influence du vent sur les propriétés urticantes des orties.

(...)
Chez les animaux le vent  accroît la respiration, accélère les échanges nutritifs ; chez les végétaux il active la transpiration.
Il peut priver momentanément les fleurs de leur parfum, évaporer le venin des glandes, désarmer la plus redoutable de toutes les herbes : l'ortie.
En février 1874, à Collioure, un vent violent qui dura vingt-quatre heures fit tomber par millier les oranges et, beaucoup, au milieu de vigoureuses orties grièches.
Avec une appréhension bien légitime, les travailleurs, le lendemain, commencèrent à ramasser les fruits d'or dans ces peu agréables plates-bandes. Leur surprise fut grande en constatant qu'ils pouvaient manier impunément ces plantes qui, la veille encore, produisaient d'intolérables piqûres.
Le botaniste Naudin auquel le fait fut signalé remarqua qu'il fallut une semaine aux orties pour reprendre leurs habituelles propriétés.
Sans doute, le venin de l'ortie grièche est un peu volatil. Dans un air calme, il s'évapore lentement à travers l'épiderme des poils et une nouvelle quantité de liquide le remplace à mesure.
Au grand vent, l'exhalation devient si active qu'elle amène, pour quelques jours, l'épuisement de la réserve.
(...)

Charles Naudin vécut dix ans à Collioure et y fit une étude complète du climat local (cf. le chapitre que je lui consacre dans 66 petites histoires du pays catalan), tout en développant son jardin botanique et acclimatant de nombreuses espèces végétales exotiques dans la région.
Je ne sais pas ce qu'il reste aujourd'hui de ce qui semble avoir été une production intensive d'agrumes à Collioure, ville jadis renommée pour son poncire, ni même s'il y a encore des orties car il me semble (c'est un constat personnel) qu'on en voit beaucoup moins depuis quelques années dans la nature. On a en tout cas, avec les périodes de grand vent, une méthode infaillible pour les ramasser sans danger !

Source : Ferdinand Faideau, Le vent et les plantes in La Science illustrée (Paris) n° 784 du 16 décembre 1902 (via Gallica)
Photo : Uwe H. Friese via Wikimedia Commons (CC-BY-SA)

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